Profilage (final saison 5) : « La mort de Fred, c’est le plus fort que l’on pouvait faire »
Toutelatele est parti à la rencontre de Fanny Robert et Sophie Lebarbier, les deux créatrices de Profilage, afin de dévoiler les dessous du final de la saison 5.
Ce jeudi 4 décembre, TF1 a diffusé le double épisode final de la saison 5 de Profilage . « Pour toujours... À jamais » s’est ouvert sur le mariage de Fred et Hyppolite, qui devait initialement épouser Jessica. Mais à la sortie de l’église, Fred est poignardée dans le dos et meurt à l’hôpital des suites de ses blessures. En tout cas, c’est ce que les membres de la DPJ croient. En réalité, Fred a été enlevée par une infirmière disciple de Roze, qui cherche à se venger de Rocher.
L’enquête mène Rocher et Chloé, bien décidés à retrouver Fred, à la prison où est détenu Roze. Ce dernier déclenche une émeute dans le but de s’évader. Ce qu’il réussit à faire avec l’aide de Rocher. Mais Chloé, qui n’a plus de médicament, est au plus mal. Sur les traces de Roze, l’équipe retrouve le psychopathe et Fred. Mais elle est violemment frappée à la tête par Roze et meurt dans les bras d’Hyppolite. Ce dernier abat Roze. De son côté, Rocher vient au secours de Chloé, mais elle est en pleine crise d’hallucinations et le poignarde.
Les créatrices de Profilage commentent ce final de la saison 5 et dévoilent leurs sources d’inspiration.
Claire Varin : Comment avez-vous abordé l’écriture de ce double épisode final de la saison 5 de Profilage ?
Sophie Lebarbier : On savait qu’on commençait par le mariage et par la mort, et qu’on repartait à rebours. Après, on a cherché une intrigue qui nous permettrait de faire le lien avec Roze en fin de premier épisode. C’était nos grandes obligations. On savait aussi qu’on voulait une émeute en prison. On voulait le tenter parce que c’est très casse-gueule.
Fanny Robert : Les dix dernières minutes, on les avait en tête tout de suite. On voulait faire ce final-là. Ce sont nos épisodes préférés avec « Tempêtes ». Et étrangement, l’écriture de ces épisodes a été très facile. Tout s’est fait dans une espèce de trans.
Dans ce final, il y a une longue séquence dans une prison. Chose extrêmement rare en fiction française. Était-ce compliqué à faire ?
Sophie Lebarbier : En huit ans de prod, ça a été le décor le plus compliqué à avoir. On voulait absolument une prison et pas transformer un hôpital psy désaffecté en prison. Et en France, pour tourner dans une vraie prison, il faut tourner dans une prison dans laquelle il n’y a plus de détenus. Or, il y a déjà tellement trop de détenus dans les prisons… On a un régisseur extraordinaire.
Fanny Robert : C’était terrible d’aller repérer ce décor. La prison de Rennes n’était désaffectée que depuis quatre ans. Quand on marche dans les couloirs, on entend encore presque le bruit des détenus. C’est encore très vivant. Il y a un petit côté American Horror Story, quand ils se baladent dans les lieux hantés. C’est très impressionnant.
Au milieu de cette émeute en prison, il y un personnage de comédie, Ezra Bonaventure...
Fanny Robert : En proposant un épisode en prison, on savait que ce serait compliquer à faire passer. Comment peut-on rendre ça fun aussi ? Il fallait qu’on trouve un personnage rigolo. C’était une proposition de Julien Teisser [scénariste avec lequel elles ont également écrit « Tempêtes », ndlr.] Et la référence, c’est Le Cinquième élément.
La mort de Fred, le geste d’Hyppolite, l’avenir de la série
Comment est venue cette intrigue autour des cercueils ?
Fanny Robert : Je voulais absolument faire un truc à la Kill Bill. Il y avait tout un délire autour de l’angoisse d’être enfermée dans un cercueil. On avait aussi parlé de Mary Higgins Clark avec la cloche autour du pied des morts. Il y a aussi un épisode de Buffy génial où elle ressuscite dans son cercueil. C’est un des meilleurs débuts de saison qui a été fait dans Buffy.
Dans ce double épisode, vous mentionnez François Bertrand, le « Sergent nécrophile » qui a été un sujet de littérature. Cette mention a-t-elle un rapport avec votre goût pour la littérature, évoqué précédemment ?
Fanny Robert : Il n’était pas du tout au point de départ de l’intrigue. À la base, on s’est demandé si on n’allait pas faire un nécrophile. C’est en faisant des recherches sur la nécrophilie dans les siècles que je suis tombée sur ce personnage. Après, j’ai lu toute son histoire. Finalement, on s’est dit : ce n’est pas ça que l’on veut faire, mais on va le faire croire. Et de toutes les recherches, seul le nom, qui me faisait mourir de rire, est resté. Ça me rappelait le chanteur qui chantait “Je te survivrai”. Donc on l’a gardé comme une vanne.
Pouvez-vous parler de la construction de l’intrigue autour de la mort de Fred. Et de votre choix final de tuer le personnage ?
Fanny Robert : On a vraiment conçu l’épisode en roller-coaster. On donne aux gens la pire chose : la mort d’un de nos héros et faire renaître l’espoir. Tout le monde s’y attend et se dit : “Ils ne peuvent faire ça, on est au milieu de l’épisode”. Effectivement, on ne leur fait pas ça, mais elle meurt. Pour nous, ça a été un déchirement terrible de se séparer de Vanessa [Valence]. Émotionnellement et en terme de cliffhanger, c’est le plus fort que l’on pouvait faire.
Vanessa Valence est très populaire. On imagine que vous anticipez la colère des fans...
Sophie Lebarbier : On sait que le public ne sera pas content. Mais franchement, ça a été la décision la plus déchirante et la plus compliquée qu’on ait eu à prendre. En aucun cas, c’était une sanction de son travail. C’est un personnage qu’on adore. Cependant, il se trouve qu’en fin de saison 4, Chloé se pend, mais qu’en ouverture de saison 5 elle est vivante. Que par ailleurs, Rocher se fait poignarder en fin de saison 5, mais qu’on va le retrouver en saison 6. Il en va aussi de la crédibilité de nos intrigues. On va arriver en saison 6 avec une famille, qui est installée depuis un certain nombre d’années, et à un moment, il faut rebattre les cartes. Ce choix s’est fait pour plein de raisons qui n’avaient rien à voir avec Vanessa Valence, ni même avec le personnage de Fred. Et Vanessa est d’un professionnalisme incroyable. Elle a continué à assurer la promo sans rien dire. On était obligé de sacrifier un membre pour le bien de l’équipe et l’avenir même de la série.
« On était obligé de sacrifier un membre pour le bien de l’équipe et l’avenir même de la série »
Lorsque Hyppolite tue Roze, on pense à Se7en, mais aussi à « Au nom de mon fils » (épisode 9 de la saison) où cette mère s’apprête à immoler la femme qui a tué son fils. Avez-vous pensé à ce parallèle entre vos deux personnages ?
Fanny Robert : On y a pensé en terme de résonance. Quand on est arrivé au moment : est-ce qu’Hyppo tire ou pas ? On a pensé à rebours à se positionner par rapport à cette femme. Ces deux personnages qui ont, dans la saison, ce choix de vie ou de mort à faire. Évidemment qu’il y a des correspondances entre les deux.
Sophie Lebarbier : Elle, elle ne « tire » pas. Et c’était important pour nous qu’elle ne tire pas parce que c’était exactement tout ce que l’on dénonce. Et je pense que tout le monde a envie qu’elle tire. Justement ce qui est fort, c’est qu’elle ne le fasse pas. Son humanité prend le pas, au dernier moment, sur son instinct de vengeance. En revanche, Hyppolite, un de nos héros, le faire se compromettre comme ça, ça nous donnait aussi beaucoup plus de richesse à exploiter après.
Vous abîmez un personnage lumineux...
Fanny Robert : On abîme un personnage de comédie. C’était amusant de faire ce parallèle-là. La femme détruite ne le fait pas. Alors que le trublion de l’équipe tire. Et surtout lui, le personnage qui, derrière une façade de cynisme, est probablement un des plus ouverts de toute l’équipe. Qu’il puisse faire ça nous a permis d’imaginer toute la saison que nous sommes en train d’écrire. Et autant dire qu’on va le retrouver dans un sale état.
N’y a-t-il pas un problème de décors pour l’appartement de la sœur de Rocher ?
Sophie Lebarbier : Il y a un énorme problème de décors. Il y a deux problèmes de décors dans ce final : l’appartement de la sœur de Rocher et la planque du dealer. On aurait dû écrire cette scène entre Rocher et sa sœur à l’hôpital.
Fanny Robert : Ça a été les deux épisodes en prod les plus lourds, les plus compliqués, les plus harassants que l’équipe a eus à tourner. Ce sont vraiment les épisodes où tout le monde a été au bout de soi-même. Alexandre Laurent [réalisateur, qui travaille également sur Falco, ndlr.] est revenu alors qu’il avait un emploi du temps surbooké, parce qu’il voulait absolument faire le final et tourner la mort de Vanessa. Émotionnellement, c’était hyper violent. Et je crois que ça se ressent dans ce final.