How I met your mother : La dernière saison vue par son co-créateur Craig Thomas
À partir de ce dimanche 7 septembre, à 12h50, NT1 donne le coup d’envoi de l’ultime saison de How I met your mother. À l’occasion de cette ultime salve, Craig Thomas, l’un des deux créateurs de la série en vacances à Paris tout l’été, a accepté de rencontrer quelques journalistes privilégiés. Toutelatele.com était présent. Dans cette première partie, il revient sur le challenge de la saison 9, le passage remarqué de Britney Spears ou encore le travail d’écriture tout au long de la série…
How I met your mother est parvenue à atteindre le cap des 200 épisodes, un fait suffisamment rare aujourd’hui dans le paysage audiovisuel pour s’y attarder. Comment expliquez-vous ce succès ?
Craig Thomas : En neuf ans, j’ai vu de nombreuses comédies être lancées et annulées. Après Friends, tant de programmes avec de jeunes adultes ont vu le jour. Aucun n’a marché car remplacer cette série est très difficile. Quand nous sommes arrivés, beaucoup de critiques disaient que l’on essayait d’être le nouveau Friends sans être bons. Je crois que si nous avons eu une telle longévité, c’est parce que nous étions en réalité différents. Notre structure n’était pas la même avec nos sauts permanents dans le temps. Le public n’avait pas le temps de s’ennuyer devant une scène au vu du rythme. Chaque épisode pouvait avoir entre 60 et 80 scènes en l’espace de 22 minutes. Nous avons également proposé des passages empreints d’émotions. Un registre que peu de sitcoms ont l’habitude d’aborder.
Etre à mi-chemin entre le drama et la comédie a-t-il été difficile à imposer à CBS ?
How I met your mother n’a jamais été la série la plus drôle de la télévision américaine, il y a beaucoup de programmes très drôles. Nous, nous nous sommes distingués en proposant le cheminement émotionnel de nos personnages. Par cette évolution, le public a pu se sentir concerné par leur sort. En fin de saison 1, Lily et Marshall annulent leurs fiançailles. Quand nous avons proposé cette dernière scène sous la pluie, la chaîne nous a répondu que les sitcoms ne terminaient pas leurs saisons de cette façon. Mais à mon sens, une série honnête doit passer par là. Au fil du temps, nous avons eu plus confiance en nous pour ce genre de scènes puisque les téléspectateurs acceptaient parfaitement des passages qui sortent du registre comique
« Je crois que si nous avons eu une telle longévité, c’est parce que nous étions en réalité différents. »
À quel degré le network intervenait dans le développement de la série ?
Aux débuts de la série, la chaîne était naturellement beaucoup plus impliquée dans la production. Sur l’ensemble, je dirais que nos relations avec elle ont été bonnes, surtout quand les audiences étaient au beau fixe. Progressivement, elle nous a fait confiance et nous laissant faire notre travail. Mais il faut lui donner du crédit. En 2005, lors du lancement, CBS n’avait aucun programme qui attirait un public aussi jeune que le nôtre, il n’y avait pas The Big Bang Theory ou d’autres séries avec des jeunes adultes en guise de héros. Je lui en serai toujours reconnaissant ; la chaîne nous a donné notre chance. À nos débuts, nous étions programmés après The King of Queens, dont le public était plus âgé, et Everybody loves Raymond il me semble [En réalité, cette dernière s’est achevée en mai 2005, soit quatre mois avant le lancement de How I met your mother, ndlr]. Nous étions un peu la brebis galeuse sur la grille. Mais CBS nous a soutenus.
Comment s’est organisé votre travail au fil de ces neuf saisons ?
Je me suis fait violence. [Rires.] Je suis de nature à souvent passer par l’autocritique. Ma méthode consiste à ne penser qu’à ce que j’écris, de tout rayer au feutre rouge et de recommencer en permanence jusqu’à ressentir un semblant de satisfaction. Ma femme peut en témoigner. [Rires.] Pour résumer, c’est une méthode de fou. J’exagère un peu, mais il y a un fond de vrai là dedans. Carter [Bays, co-créateur de la série, ndlr] et moi, nous avons une vision d’ensemble. Nous imaginions avant tout des arcs d’épisodes et la forme générale avec un début, un milieu et un fin. Nous définissions à l’avance un surprenant cliffangher de fin de saison, lui même définissait le début de la salve suivante. On peut dire que nous avons abordé How I met your mother comme un roman, avec des chapitres, plutôt qu’une succession d’épisodes.
Partie 2 > Les différences de production avec la France, le passage remarqué de Britney Spears en saison 3...
Produire 24 épisodes par an est un véritable défi. Pouvez-vous revenir sur ce travail d’équipe avec les auteurs ?
J’ai appris récemment, en discutant avec des Français, que votre méthode de travail est très différente. Nous, nous avons une writers room (salle d’écriture, ndlr) composée de 11 à 14 personnes. Produire autant épisodes sur une saison est un travail considérable. Avant de commencer l’écriture du premier épisode, nous présentons avec Carter une sorte de grande carte à l’équipe avec les points importants de la saison, mais tous les détails ne sont pas indiqués. Nous discutons collectivement pour définir ce qui composera chaque épisode et répartissons l’écriture. Un auteur est alors chargé d’écrire la trame principale en paragraphes sur laquelle nous apportons des précisions. Nous le présentons au studio et au diffuseur qui, à leur tour, font des annotations. Le scénariste rédige alors un premier jet à partir de ces informations et commentaires, et ce, en l’espace environ d’une semaine. Nous discutons et corrigeons certains éléments par la suite avant qu’il ne propose une nouvelle version, elle aussi présentée à la writing room où chacun est libre d’apporter des précisions... Chaque épisode représente un travail de plusieurs semaines.
« Le danger pour une série qui commence à avoir plusieurs années à son actif est d’être dans la répétition »
Dans une interview, Carter Bays a récemment reconnu que Britney Spears avait en quelque sorte sauvé la série grâce à ses apparitions au cours de la saison 3. Quel regard portez-vous sur sa participation ?
Elle nous a vraiment aidés, c’est certain. Son apparition est arrivée après la grève des scénaristes, à une période où il n’y avait plus d’épisodes inédits pendant plusieurs mois. Nous étions dans le flou quant au sort de la série. Nous réalisions de bonnes performances, mais nous n’étions pas un hit. Il y avait une vraie crainte que le public ne revienne pas. Nous avions neuf épisodes après la pause, et l’un d’eux était celui avec Britney Spears grâce auquel nous avons réalisé notre meilleure audience. C’était un bon timing, pour elle comme pour nous. Je lui en suis très reconnaissant. On ne pourra jamais savoir si sans elle How i met your mother aurait été annulée, mais elle a permis à un tout nouveau public de s’y intéresser. Avant son passage, pour beaucoup, nous n’étions que « le programme de CBS au titre bizarre ». [Rires.]
How I met your mother s’est achevée avec une saison 9 un peu particulière, dont le récit s’est déroulé le temps d’un week-end. Comment avez-vous abordé cette dernière salve ?
Ça a été un vrai défi avec l’appréhension que le huis clos soit trop étouffant pour le téléspectateur. Certains épisodes avaient une majorité de flashbacks ou de flashforwards, je crois que nous n’en avons jamais autant fait que lors de cette saison 9. Mais c’était tonifiant d’aborder un exercice aussi différent. Le danger pour une série qui commence à avoir plusieurs années à son actif est d’être dans la répétition, avec tous les ans, un épisode d’Halloween, un de Noël ou sur le Nouvel An... Couvrir une année entière peut être répétitif. Ne pas avoir à le faire a été plaisant en tant qu’auteur.
– Retrouvez la seconde partie de l’interview sur Toutelatele dans quelques semaines pour la diffusion des ultimes épisodes...